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Pauline Bonaparte, la Vénus de l’Empire – Flora Fraser

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Pauline Bonaparte
Pauline Bonaparte peinte par Robert Lefèvre en 1806 – Château de Versailles et de Trianon

   Pauline Bonaparte fut non seulement la sœur préférée de Napoléon, mais également la plus célèbre. Célèbre pour ses frasques et son profil de déesse grecque. Mais une fois évoqués cette beauté, légendaire, et ce goût démesuré pour la provocation, que dire ? Que savons-nous réellement de celle qui passait pour l’une des plus belles femmes de son époque, Vénus ainsi représentée par le sculpteur Canova ? Souvent peu de choses en vérité…

   Certains trouveront que l’existence de Pauline, dénuée de tout rôle politique, faite de coquetterie et de plaisirs, n’est pas particulièrement passionnante. Néanmoins, ce livre apporte des révélations (il n’est pas nécessaire de jouer un rôle en politique pour avoir une vie bien remplie), et il est toujours intéressant de s’immiscer au cœur de la vie d’une Napoléonide, ne serait-ce que pour forger sa propre opinion sur le personnage.

   Flora Fraser, auteur que je découvre, se propose ici d’apporter des éclaircissements sur la vie de la plus excentrique des trois sœurs Bonaparte.

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Pauline l’effrontée

   Indéniablement, et cela l’auteur nous le fait comprendre dès les premières pages, Pauline Bonaparte a une haute estime de sa personne. Et elle ne fait pas partie de ces jeunes filles qui ont froid aux yeux. Elle est belle, elle le sait : on le lui répète constamment. Très tôt, elle s’intéresse aux hommes… et elle les intéresse. Très vite, elle impose à son entourage qu’il la traite comme une véritable princesse de sang, avec les honneurs, les titres et les richesses qui vont de pair, plus particulièrement lorsqu’elle devient princesse Borghèse. Coquette à souhait, elle ne manque pas de choquer par ses tenues, et c’est sans crainte qu’elle pose presque nue pour Canova. L’auteur s’attarde sur la conception de cette célèbre statue de la jeune femme.

   Flora Fraser nous embarque pour une incursion dans le monde original, excessif et impertinent de Pauline. Le caractère non conformiste de la princesse a de quoi surprendre : ses frasques parfois enfantines, parfois mesquines, sa nature assez capricieuse, son appétit sexuel impressionnant, son désintérêt pour le « qu’en dira-t-on ». Une femme de caractère, comme toutes les femmes Bonaparte. Pauline est, de loin, la plus libérée, la plus effrontée, la plus piquante. Les anecdotes, que Flora Fraser nous relate dans un style très correct, font parfois sourire.

   En toile de fond, l’auteur explique convenablement les évènements qui conduisent à  l’élévation de Napoléon et de toute la famille, tandis que des guerres enflamment l’Europe. Le lecteur ne manque alors pas de noter l’ambition que nourrit Pauline à l’égard de sa personne ou de sa famille. A Napoléon elle demande des honneurs et des commandements pour ses deux maris, des terres, des titres pour elle-même…

 

 

 

 

 

Portrait en pied de Pauline Bonaparte, peint par Marie-Guillemine Benoist en 1808 - Château de Fontainebleau
Portrait en pied de Pauline Bonaparte, peint par Marie-Guillemine Benoist en 1808 – Château de Fontainebleau

 

   Je n’ai pu m’empêcher de m’étonner devant la facilité avec laquelle elle multiplie les amants à la vue de tous, surtout celle de son second mari, qu’elle trompe abondamment. Il est vrai que le pauvre Camille Borghèse n’est pas une lumière, mais Pauline est une femme particulièrement volage : il suffit de tenir un rapide inventaire de ses amants et d’analyser les témoignages des délaissés pour comprendre que chez Pauline, la maxime « un de perdu, dix de retrouvés » est un  véritable style de vie. Seule une infime poignée d’hommes sauront toucher réellement son cœur : Flora Fraser s’arrête un instant sur leur histoire.

Pauline la courageuse

Portrait en pied
Portrait en pied de Pauline Bonaparte par Robert Lefèvre, peint en 1806 – Château de Versailles et de Trianon
 
 

   Flora Fraser s’attache à réhabiliter Pauline, avec un souci de coller au plus vrai ce que fut sa vie. Et, finalement, quel personnage difficile à cerner que cette Pauline Bonaparte ! Car si ses caprices sont commentés, et si sa réputation de croqueuse d’homme est répandue dans toute l’Europe voir au-delà, son courage est moins reconnu. Passé sous silence, la plupart du temps, par les détracteurs de Napoléon qui préfèrent retenir que Pauline est une dévergondée, plutôt que de se souvenir qu’elle fut la seule des frères et sœurs de Napoléon à le rejoindre lors de son exil à l’Ile d’Elbe. La plupart des historiens également n’ont retenu que ses défauts. Enchainée à son rôle de femme frivole et scandaleuse n’ayant d’autre préoccupation que son propre confort et sa propre gloire, Pauline Bonaparte mérite un portrait plus nuancé, plus juste en somme. Flora Fraser s’y attèle.

   Pauline, derrière ce libertinage de façade, qui fait certes partie de son caractère, est une âme forte, qui ne craint pas le danger. J’ai particulièrement apprécié les deux chapitres relatant le voyage entreprit par Pauline dans sa jeunesse, avec son premier mari le général Leclerc, et leur fils Dermide. Cette expédition à Haïti, qui apporte beaucoup d’exotisme à son histoire, met bien en lumière le courage précoce dont elle sait faire preuve. Il permet de se rendre compte également de l’amour réel qu’elle vouait à Leclerc, et Flora Fraser en profite pour nous brosser un portrait concis mais assez complet de cet homme bon qui connut une fin tragique.



   Faute de se comporter en épouse fidèle, Pauline est une sœur fidèle. On ne peut que louer le dévouement indéfectible qu’elle manifeste à l’égard de son frère. Alors que tous abandonnent l’Empereur au moment de sa chute, Pauline au contraire s’érige en ange consolateur. Elle qui n’en faisait qu’à sa tête sous le Consulat et plus encore sous l’Empire, dépensait sans compter pour ses toilettes et ses bijoux, offrait au monde entier le spectacle de ses amours scandaleux, affirme sa loyauté au moment où Napoléon en a le plus besoin. Elle quitte tout sans regret pour le retrouver à l’Ile d’Elbe, ce frère à qui elle reconnaît devoir sa vie, et demandera, sans succès, qu’on la laisse le rejoindre à Sainte-Hélène. Le chapitre qui relate son passage sur l’Île est très intéressant et montre le souci qu’elle avait d’adoucir le sort de l’Empereur déchu. Le courage ancré en elle, qu’elle a déjà manifesté étant plus jeune, resurgit dans toute sa splendeur. (Découvrez un autre frère de Pauline, Jérôme Bonaparte, Roi de Westphalie !)

   Autre forme de courage : la détermination avec laquelle elle supporte la maladie qui la ronge depuis son accouchement. Flora Fraser analyse les maux dont est victime Pauline et répète à son lecteur : oui, elle aimait se faire porter à tout bout de champ, oui, elle aimait rester couchée lorsqu’elle recevait des invités, mais la marche était parfois un véritable supplice pour cette femme qui se mit très tôt à souffrir de maladies intimes. Bien sûr, de temps à autre elle joue de sa santé fragile, l’auteur ne nie pas, au contraire, mais la plupart du temps, elle est vraiment atteinte et il lui faut beaucoup de courage pour donner le change et supporter toutes ses souffrances.

 

Quelques lacunes

   A mon goût, cet ouvrage manque de profondeur sur certains sujets. Il aurait été intéressant de savoir ce que les contemporains pensaient de la princesse Borghèse, outre sa beauté et son caractère très extravagant. Avait-elle de l’esprit ? Pouvait-elle se montrer généreuse avec autrui tout comme elle pouvait se montrer odieuse ? Etait-elle aimée pour des qualités morales ? Comment son second mari la considérait-il exactement, comment s’entendait-elle avec sa belle famille, l’une des plus célèbres d’Italie, et a-t-elle gardé des liens avec celle de son premier mari ? Tout ceci est évoqué, mais simplement survolé. Quelques pages approfondissant ces sujets auraient été appréciables.

  Malgré ces quelques lacunes, c’est un ouvrage que je conseille, ne serait-ce que pour la facilité avec laquelle il se lit. C’est un livre plaisant, qui apporte des informations sur un personnage attachant malgré ses caprices et ses lubies et, s’il n’est pas assez fouillé, ne manque pas de séduire. Oui, le charme de Pauline opère à travers les pages et à travers l’Histoire !

pauline bonaparte

 

Des affirmations erronées

   Tout au long de ma lecture j’ai pu relever un certain nombre d’affirmations inexactes. Je me propose ici de les corriger, dans la mesure de mes connaissances.

  • Mme Campan, plus connue comme la célèbre lectrice de Marie-Antoinette, n’était pas au service des sœurs de Louis XV, mais bien de ses filles. Car s’il a engendré des filles à ne plus savoir qu’en faire, Louis XV n’a jamais eut de sœurs.
  • Certaines références aux Mémoires de Barras me paraissent mal venues. Il est difficile de s’attendre à de l’objectivité de sa part puisque, dupé par Napoléon et Joséphine lors du Consulat, il a pris en haine tous les Bonaparte.
  • L’affirmation attestant que l’Empereur souhaitait très tôt se séparer de Joséphine (déjà sous le Consulat) est assez étrange. Dans plusieurs autres biographies que j’ai lu, il est très clairement expliqué que Napoléon, encore au commencement de son règne d’Empereur, ne souhaitait pas du tout fonder une dynastie. La stérilité du couple n’était pas encore un grave problème pour lui, et il savait reconnaître en Joséphine une parfaite Impératrice. Ce n’est qu’après, vers 1807-1808, qu’il se persuade que son régime ne pourra être accepté que s’il fonde sa propre lignée et épouse une vraie princesse de sang.
  • Enfin, selon Flora Fraser, l’Empereur, lorsqu’il a décidé son inoubliable couronnement, ne souhaitait pas le moins du monde que Joséphine y participe, étant d’accord avec ses frères et sœurs. Il ne s’y serait résolu qu’à contre cœur. En réalité, les caprices de sa famille, résolue à empêcher le couronnement de Joséphine, l’exaspéraient au plus haut point, comme l’atteste cette phrase de lui, que j’ai lu notamment dans la biographie de Joséphine par Françoise Wagener :

    Ils sont jaloux de ma femme, d’Eugène, d’Hortense, de tout ce qui m’entoure (…) Si j’avais été dans une prison, au lieu de monter sur le trône, elle aurait partagé mes malheurs. Il est juste qu’elle participe à ma grandeur (…) Oui, elle sera couronnée !

 

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∫∫  Ce qu’il faut retenir ! ∫∫

 Procurez vous « Pauline Bonaparte, la Vénus de l’Empire » !

 

Points positifs

 Facilité de lecture, accessible à tous

♥ Une vision objective de Pauline qui nous dévoile deux femmes : la coquette capricieuse, et la courageuse déterminée

♥ L’exotisme des chapitres relatant l’expédition à Haïti, dignes des aventures d’un explorateur

Points négatifs

Quelques affirmations erronées ou étranges pouvant surprendre

Manque de profondeur sur certains sujets, ce qui ne comblera donc pas les plus exigeants

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Un autre Bonaparte ? Consultez : Napoléon III, d’Eric Anceau !

 

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Cet article a 2 commentaires

  1. JC

    Très bonne critique pour une première ! J’attends la suite avec impatience !

    1. Plume d'histoire

      Merci pour ces encouragements !

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