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Jeanne de Pompadour : Maîtresse frigide et femme fragile

   Louis XV, l’un de nos plus beaux Rois Bourbons, est un souverain très facilement rongé par l’ennui. Le fond de sa personnalité est la tristesse, à cause de son caractère dépressif lié à une enfance malheureuse.

   En devenant la maîtresse du Roi au cours de l’année 1745, Jeanne-Antoinette Poisson, dite Madame d’Étiolles et bientôt faite marquise de Pompadour, est-elle vraiment consciente des difficultés de sa position ?

  Probablement. Belle, éduquée, cultivée, Jeanne de Pompadour est aussi prodigieusement intelligente. Et ambitieuse. Mais pour une femme d’une telle condition physique, la tâche est quasi surhumaine.

Jeanne de Pompadour et sa « vie terrible » à Versailles

   Au sein d’une Cour qui la dénigre, la surnomme avec méchanceté la « Caillette » et raille ses origines bourgeoises, la marquise vit un combat de chaque instant. Elle doit sans cesse trouver de nouveaux amusements pour son amant, rester « la magicienne qui enchantait sa vie quotidienne ».

   Soucieuse d’entraîner Louis XV dans « un tourbillon de plaisir » qu’elle semble capable de renouveler à l’infini, Mme de Pompadour n’a pas le droit de se reposer un seul instant. Elle connaît la précarité de la situation de favorite et elle n’a pas le doit à l’erreur.

  Or Jeanne-Antoinette est, depuis sa plus tendre enfance, de santé très fragile. Enfant, on craint plusieurs fois pour sa vie. Ses bronches ne supportent par le froid et les courants d’air, innombrables à Versailles ! De violentes migraines et des étourdissements la clouent au lit fréquemment. Le remède ? Des saignées, qui ne font que l’affaiblir davantage.

Avec sa santé chancelante, ses migraines, ses crachements de sang, Jeanne-Antoinette était épuisée.

   Depuis qu’elle est la maîtresse du Roi, à la constitution fragile de Mme de Pompadour s’ajoutent des troubles d’ordre gynécologique à répétition.

Il semble bien qu’elle ait fait, entre avril 1746 et avril 1749, trois fausses couches.

   Elle souffre notamment d’une leucorrhée qui doit rendre douloureux les rapports sexuels. Ses ennuis intimes, elle s’efforce tant bien que mal de les dissimuler. Mais tout se sait dans le monde clos et médisant qu’est alors Versailles. Les « gênes » de la maîtresse du Roi sont de notoriété publique… Profondément humiliant et blessant pour Jeanne-Antoinette.

La vie que je mène est terrible, écrit-elle en 1749 à la comtesse de Lutzelbourg.

Louis XV par Quentin de La Tour
Louis XV par Quentin de La Tour

👀 Découvrez la biographie de la marquise de Pompadour par Évelyne Lever

Une favorite royale qui met peu d’ardeur à l’amour

   En plus d’être « l’homme du royaume le plus difficile à amuser », Louis XV est un amant extrêmement exigeant. Jeanne-Antoinette est belle, sa séduction s’exerce sur tous ceux qu’elle rencontre… mais cela ne suffit pas. Elle sait que son corps va, un jour ou l’autre, la trahir.

Peu sensuelle, elle n’avait jamais apporté beaucoup de fougue à l’amour.

   La marquise, désolée, constate qu’elle ne peut répondre aux ardeurs amoureuses de son royal amant. Il se plaint parfois de sa froideur, et elle se montre incapable de feindre longtemps de façon convaincante. Cette frigidité tourmente Mme de Pompadour. Elle s’astreint alors à un régime désastreux, expérimentant tous les aphrodisiaques imaginables : potages au céleri et aux truffes, chocolat vanillé et ambré… Tout cela avec pour seul effet de détraquer un peu plus sa santé.

Il n’y avait pas de solution miracle pour la transformer en amoureuse volcanique.

 Des prétendantes à sa succession se réjouissent ouvertement de savoir qu’elle n’est pas capable de satisfaire les sens du Roi. Et Louis XV regarde parfois avec intérêt ces femmes qui ne demandent qu’à partager son lit.

Malgré son ambition, son énergie, sa ténacité, Madame de Pompadour ne laissait pas d’être obsédée par la précarité de sa position.

   Qu’arrivera-t-il s’il se lasse d’elle, retrouve une seconde jeunesse dans les bras d’une maîtresse experte aux jeux de l’amour ? Sera-t-elle renvoyée ? Il n’en est pas question.

Quel que fût le prix à payer, Madame de Pompadour n’entendait pas renoncer à cette vie.

Jeanne-Antoinette Poisson, marquise de Pompadour, en Diane Chasseresse par Nattier (collections du château de Versailles)
Jeanne-Antoinette Poisson, marquise de Pompadour, en Diane Chasseresse par Nattier (collections du château de Versailles)

📌 À lire aussi : Marie-Anne de Bourbon, l’éphémère fiancée de Louis XV

La marquise de Pompadour, l’amie indispensable de Louis XV

   Étrangement, Madame de Pompadour va réussir le tour de force de se maintenir à la première place à la Cour, tout en abandonnant son statut de maîtresse. Dès 1750, soit cinq ans après le début de leur relation amoureuse, la marquise cesse tout rapport charnel avec le Roi. Ce tournant tant redouté consolide pourtant la position de Jeanne, qui devient « l’amie indispensable » d’un Roi lié à elle par une profonde affection et la force de l’habitude. Le monarque trouve son plaisir ailleurs (au Parc aux cerfs notamment) et Jeanne compte bien davantage que ses petites maîtresses.

Elle était devenue partie intégrante de sa vie, savait comment apaiser ses crises de découragement, ses angoisses, son hypocondrie, elle connaissait ses goûts et ses habitudes. Mais elle était aussi (chose rare à Versailles) une amie loyale, affectueuse et tendre, dont les intérêts coïncidaient parfaitement avec les siens.

   Elle seule sait l’écouter, le rassurer, l’amuser. Aucune grande favorite de l’histoire ne peut ainsi se targuer d’être restée auprès du Roi sans avoir à partager son lit. Les journées de Mme de Pompadour n’en sont pas moins exténuantes. Elle s’épuise à la tâche, et son corps malmené la lâche prématurément.

  Jeanne de Pompadour s’éteint à Versailles à l’âge de quarante-deux ans, en 1764, usée par cette vie harassante, minée par une congestion pulmonaire. La Cour l’aura tuée. Littéralement…

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Sources

♦ Madame de Pompadour, de Evelyne Lever

♦ Reines et favorites: Le pouvoir des femmes, de Benedetta Craveri

♦ Louis XV, de Jean-Christian Petitfils

♦ Louis XV, de Michel Antoine

Les Reines de France au temps des Bourbons : La Reine et la favorite, de Simone Bertière

Cet article a 13 commentaires

  1. Marine

    Toujours délicat de savoir quelle est la part de sincérité dans les actes et les sentiments d’une favorite, il n’empêche que Madame de Pompadour est selon moi une personne touchante et respectable. Bel article, merci!

    1. Plume d'histoire

      Rien à voir avec Mme de Châteauroux avant elle… !

  2. Athenais

    c’est un parcours original pour une favorite

    sympa tes sources surtout le livre de Simone Berthière

    1. Plume d'histoire

      Simone Bertière reste pour moi une référence !

  3. Marie

    «… Encore un moment, Monsieur le Bourreau, juste un petit moment… » (Que Samson lui accorda.)

    1. Plume d'histoire

      Il s’agissait de Madame Du Barry 🙂

  4. Piqueras

    Tres intéressant, je ne connaissais pas en détail la vie intime de Madame de Pompagour , qui ne fût guère aimée à la Cour . On s’ y attache d’ autant plus .
    Merci Marie pour tout tes articles qui sont précis, instructifs et savamment dosés.
    Florence

    1. Plume d'histoire

      Merci Florence !! 🙂

  5. Romain

    à mon (très) humble avis, le titre de cet article est un peu expéditif par rapport à la trajectoire, plus complexe et plus nuancée, de cette personnalité exceptionnelle. Je trouve particulièrement regrettable que cette accroche un peu brutale et à la tournure involontairement misogyne soit érigé en slogan définitif. Un comble pour une femme de cette valeur et aux atouts nombreux, que vous soulignez. Mais ces quelques réserves n’entachent pas votre talent et cette passion communicative. Votre plume vive et précise a du tempérament et c’est très bien !

    1. Plume d'histoire

      J’ai voulu montrer un côté moins connu de la Pompadour, et non pas décrire cette personnalité dans son ensemble, les biographies sont faites pour ça 🙂

  6. andré van opdenbosch

    Excellent….!

  7. isabella

    Une femme spirituelle jusqu’à ses derniers instants disant à son confesseur sur le point de s’en aller « encore un instant monsieur l’abbé, nous partirons ensemble… »
    Il y aurait tellement à dire sur le courage et la volonté de cette femme qui s’évertua à redonner un peu de moralité à ce Versailles aux moeurs dépravées.

    1. Plume d'histoire

      Qu’allait-elle faire dans ce panier de crabes… Elle se plaignait de cette vie mais au fond elle aimait ça

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